Au début du XVIIe siècle,à l'instar de
l'affaire Gilles de Rais en France au siècleprécédent, un événement frappe les
imaginationsdans ce pays très superstitieux qu'est la Hongrie ; c'est le
procès,en 1611, de la comtesse Erzsébet Bathory. Celle-ci est accuséd'avoir
fait enlever et saigner comme des animaux de boucherie de malheureusejeunes
filles qui habitaient dans les villages aux alentours de son châteaude Csejthe,
situé au sommet d'une colline dans la région montagneusede la Hongrie proche
des Carpates. Selon les chroniques de l'époque,le nombre de victimes se situait
entre quatre vingts et trois cents ; lavérité se situe probablement plus près
du second chiffre.Comme dans le cas de Gilles de Rais, il n'y a rien de surnaturel
dans cetteaffaire : personne n'a affirmé que la comtesse Bathory étaitune
morte-vivante, mais toutes les chroniques s'accordent à direqu'elle prenait un
vif plaisir à boire le sang de ses victimes etmême à en remplir sa baignoire,
dans le but de préserverle plus longtemps possible sa jeunesse et sa beauté.
Lorsque débute cette tragique
histoire,Erzsébet est l'épouse délaissée du comte FerenezNadasdy, soldat réputé
pour sa bravoure. Son mari étanttoujours parti livrer bataille, Erzsébet, pour
tromper son ennui,s'initie à la magie noire, grâce à Thorko, un serviteurqui va
devenir son âme damnée, et commence à faire enleveret à torturer quelques jeunes
paysannes. Après la mort deson mari en 1600, Erzsébet peut s'adonner librement
à sescoupables activités, aidée par Thorko ainsi que par sa nourriceIlona Joo,
son majordome Johannes Ujvary et une sorcière nomméeDarvula.
Pendant dix ans, des dizaines de jeunes
filles,enchaînées dans les cachots du château, seront torturéesavec raffinement
et saignées à mort. Devant le nombre impressionnantde disparitions de jeunes
femmes dans la région, des rumeurs se répandentet, pour y mettre fin, le 30
décembre 1610, le comte Gyorgy Thurso,cousin d'Ezsébet, à la tête d'une
compagnie de soldatset de gendarmes, investit le château au moment même ou se
déroulel'une de ces orgies sanglantes. Outre des cadavres de jeunes femmes,
ondécouvre dans les cachots souterrain des prisonnières encorevivantes, dont le
corps a été lardé de milliers depiqûres d'aiguille, et d'autres qui n'ont pas
encore subi de sévicesmais qui attendent leur tour.
Sauvée de la peine capitale grâceà ses liens de
parenté avec la famille royale, la comtessesera gardée en captivité jusqu'à sa
mort dans sa proprechambre dont on mure les fenêtres et la porte en ne laissant
qu'unétroit interstice pour lui passer les plats, tandis que ses
complicesseront tous exécutés. Le château étant demeuréà l'abandon après la
mort de la comtesse, l'endroit resteralongtemps maudit.
L'affaire Bathory a contribué àrépandre dans la région toutes sortes de rumeurs et de légendesselon lesquelles la comtesse aurait continué, après sa mort,à se livrer à ses débauches sanglantes, devenant ainsiun vampire au sens propre du terme. Erzsébet Bathory, rivale fantastiqueet non moins littéraire, inspire encore de nos jours toutes sortesde films et de romans dont le titre le plus rapprochant semble êtrecelui de "Carmilla".